J'ai longtemps hésité à écrire cet article, le publier.. Repoussant chaque jour la tâche de l'écriture, tournant et retournant mes phrases pour que ça sonne bien, que cela aie du sens.
J'aimerais revenir écrire ici et vous dire que tout va bien, tout est beau dans le meilleur des mondes. Mais...
Il y a un mot simple sur un état compliqué : dépression. C'est un mot qui fait peur, qui est parfois incompréhensible, souvent nié et balayé.
On pourrait dire que j'ai tout pour être heureuse, une bonne situation, un ami parfait, une famille présente, pas de problèmes de santé. Mais tout ça c'est de l'apparence, alors lorsque j'ose avouer que je fais une dépression on me dit que je m'écoute trop, que ce sont des comédies. Il n'en est rien.
"La dépression c’est un peu comme si tu marchais sur l’eau ou sur les sables mouvants : toute ton énergie physique et mentale cherche à rester à la surface, mais tu retombes très rapidement dans un trou"
Je ne sais pas vraiment lorsque tout a commencé, aux alentours de Noël mes journées se sont assombries au rythme du soleil. La saisonnalité dit-on. Alors que je gardais enfouis des torrents de larmes durant le jour et que je déversais mon flot de retour à la maison, que je ne riais plus vraiment, que j'étais plus distante avec tout le monde, la dépression a pris le dessus.
Pendant deux mois j'ai résisté plus que tout, en me persuadant que c'était une mauvaise passe, que le moral allait revenir, qu'il fallait que je sois forte, je n'ai rien laissé paraitre, et puis du jour au lendemain mon corps ne suivait plus, de crises d'angoisses en crises d'angoisses, des sanglots, la gorge nouée, plus envie de parler à qui que ce soit... Les trajets en métro étaient devenus un calvaire, les heures de cours étaient des coups de poignard dans le ventre tant l'angoisse me rongeait, et puis ensuite le travail, les sorties, les courses... Mon quotidien est devenu un enfer et puis même si c'est dur à lire, dur à entendre, j'ai eu envie de mourir.
C'est au bout de deux gros mois de brouillard que mes médecins ont levé le drapeau rouge, et je me suis faite arrêter. Cela a été une décision très difficile à accepter, et à appliquer : Quid du diplôme (je suis en alternance) ? Quid du travail ? Quid des finances ? Quid de ce que vont penser les autres.
Oui, je fais une pause, c'est la première fois depuis des années que je prends une décision pour moi sans penser aux conséquences que cela aura pour les autres. Du jour au lendemain je devais quitter une équipe de travail et des projets en cours, mettre en stand-by des travaux d'école, des groupes, toute une organisation à revoir. J'en ai eu un besoin vital.
On dit souvent que c'est dans le besoin qu'on reconnait ses amis. La dépression m'a permis de redonner un sens à ce lien. C'est au plus proche de la crise que j'ai vu les vraies amitiés se détacher des fausses. Quand l'ami qu'on attendait n'est finalement pas au rendez-vous et que celui dont on espérait rien vous tend la main, tout est chamboulé. C'est ainsi que j'ai reçu des coups de personnes que je pensais mes amis, que j'ai attendu des paroles qui ne sont jamais arrivées, que des liens ont été rompus. Mes meilleurs amis sont devenus mes alliés, soutenant chaque choix et chaque temps, leurs mots d'encouragement sont précieux et me maintiennent à la surface, jamais je ne les remercierai assez pour cela, mon copain est aussi présent dans tout et essentiel, pour ma famille c'est une autre histoire.
La décision de mettre ma vie extérieure en pause pendant quelques mois n'est pas toujours comprise, ainsi mes parents ont été très inquiets et m'ont posé mille questions, patients, ils me laissent gérer cette dernière année d'études et encaissent mes choix s'ils ne leur conviennent pas. Je n'ai pas osé avouer à une grande partie de ma famille que je souffrais car j'ai peur qu'on me juge, qu'on ne comprenne pas, qu'on me dise que je suis faible et que j'ai échoué, que je m'écoute trop et que tout ça c'est du vent. Alors j'ai fait semblant que la vie continuait pour moi. Pourtant c'est un moment où j'aurais eu besoin de mots, de soutien, d'attentions. Ce week-end encore devant tout le monde j'ai gardé la tête haute, passant rapidement les questions sur mon boulot, mes études, alors que j'avais juste envie de tout déballer, dire que non depuis quelques mois j'ai du mal, je n'y arrive plus, que j'ai eu beau m'accrocher, m'écorcher les doigts sur la pente, je n'ai pas réussi à la grimper. Pourtant c'est de la famille qu'on attend le soutien et de compréhension.
Si je connais la cause de ma dépression je ne connais pas le remède. Et tous les jours est une victoire sur la vie. Chaque sortie, chaque diner, chaque sourire est un effort. Certains moments sont plus durs que les autres et il m'arrive encore de me dire que ce calvaire ne s'arrêtera pas. Alors je passe le plus clair de mon temps à méditer, à me poser avec moi-même et réfléchir à "l'après", je choisis mes loisirs et je profite des petits instants de bonheur au milieu de l'obscurité. Et je dors.
C'est un passage à vide pas une comédie, et je saurais trouver la force de me relever, de respirer à nouveau sans oppression, je retrouverai le goût des jolies choses et l'envie de vivre. Heureusement je ne suis pas seule, alors sans ordre particulier merci à Camille, Laure, Lucile, Morgane, Quentin ...
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